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Un rêve de papillon
6 septembre 2006

Saute, marquis, saute!

Oyez, oyez, mesdames, mesdemoiselles et messieurs, le récit palpitant d'une sauteuse en parachute amatrice qui a chaud aux yeux!
Le 3 septembre 2006, jour de son anniversaire, la jeune Féline a fêté ses vingt ans pendue à un parachute et collée à un "sublime" moniteur (ayant dépassé la soixantaine, très fier de ses exploits, et profiteur de la situation lorsqu'une donzelle accrochée contre lui dépend entièrement de sa science et de ses petits bras musclés)...
Elle a ressenti beaucoup de "némotions" procurées par des "sensations fortes" (c'est le terme consacré) inédites et presque indescriptibles... Et puisque ses lecteurs sont gentils et attentionnés, elle va essayer de leur narrer l'aventure du papillon avec des mots qui volent.

Après deux heures et demie de route et d'errance, en demandant notre chemin à deux petites vieilles nous interprétant un vrai sketch comique pour nous indiquer le chemin de '"hippodlôôme", et en interpellant un vieux monsieur sourdingue dans son jardin, nous avons pris la route qui "descend tlèèès dur"  et nous avons enfin trouvé notre voie, celle de l'aérodrome...

Un vieux coucou posé tout près me donne un avant-goût de l'aventure, et un homme nous parle d'un "coin de ciel bleu" pour nous faire comprendre que le ciel gris a cloué la personne que nous cherchons dans son bureau. Là, timidement, nous entrons. Déception. Agacement. Tristesse et hargne. "Avec le temps qu'il fait, cela m'étonnerait que l'on puisse sauter. Mais vous pouvez toujours attendre", nous annonce le responsable dans sa combinaison athlétique (qui lui donne l'air intelligent du marsouin devant un minitel.)
Attendre. Vautrée dans un fauteuil très confortable. Me retourner toutes les cinq minutes pour scruter les nuages gris par la baie vitrée, pour implorer le ciel de ne pas me tomber sur la tête. Je suis terriblement déçue. Des pilotes lisent le bulletin météo qui vient de tomber, et l'air narquois, me narguent tout haut en ne me laissant aucun espoir. J'y crois, moi. Je veux sauter, donc je vais sauter. CQFD. Tout le monde part défaitiste. Je veux y croire, moi. Je suis dégoûtée, mais je SAIS que je vais sauter. J'ai mon bracelet porte-bonheur, merde quoi. Le soleil ne peut pas me laisser tomber, je l'apprivoise depuis que je suis petite. Et soudain... un rayon me tombe dessus. Je le savais. Il fait beau! Merci merci merci de m'avoir exaucée, continuer à prier le soleil pour qu'il darde ses rayons assez longtemps. Les gens s'agitent. "Tous sous le hangar, on va pouvoir sauter!" Fébrile, je cours, je me précipite sous le hangar où l'on commence à nous donner les instructions, près du coucou "design".
On me harnache. Mon moniteur sera Yves, un vieux gars rodé au saut, j'atterrirai sur mes deux pattes, aucun doute! L'excitation monte. On attend un peu. Un peu beaucoup. Le temps s'allonge, j'attends. les nuages sont revenus, le vent s'est levé. Bon, on saute? J'interpelle Yves. Les deux facteurs météo conjugués font que le saut en parachute sera un peu "dangereux". Pfff, tu parles, on sera juste déportés à l'atterrissage, un jeune moniteur dit qu'ils ont déjà sauté dans de bien pires conditions, il est partant, mais ce n'est pas lui qui décide. Ecoutons donc le sage Yves, qui ne fête pas ses vingt ans aujourd'hui et ne tient pas absolument à sauter dans des conditions qui ne sont pas optimales. Tenons compte aussi de ma déception immense et de l'ennui profond de Didi lorsque Yves nous assomme de ses exploits passés et des détails de sa carrière à Broussy-les-Oies dont tout le monde se fout. J'ai envie de lui taper dessus, il m'énerve à prendre ses poses de jeune miss France en nous expliquant le pourquoi du comment ça se fait qu'il n'est pas raisonnable de sauter quand il y a des nuages et du vent. J'avais promis à Mata Hari de lui rapporter un bout de nuage. Et le vent fait gonfler la voile. Alors, on peut sauter? Il m'ôte le harnachement, pour me soulager, soi-disant. Je voulais le garder... l'enlever m'ôte quelques espoirs.
"Allez manger", inutile d'attendre à scruter l'horizon, il n'y a que des nuages gris et mornes, désespérants. Je veux sauter, donc je vais sauter. Je le sais. On va manger, et on attendra jusqu'à la fin de la journée s'il le faut, mais je sauterai, je le sais, je le veux.
Déjeuner dans un petit restaurant de la vieille ville. Mon père prend un dessert, et un café. Je suis stressée. Tout le monde le sent. J'ai peur de rater le coche. Je sais que je vais sauter, le soleil joue à cache cache, je crois voir le vent tomber. J'ai un bon pressentiment. J'aimerais que l'on se dépêche de revenir à l'aérodrome. On ne traîne pas.
Arrivés sur place, le responsable nous annonce d'un air déçu: "Mauvaise nouvelle, on ne sautera pas aujourd'hui". Il part lentement dans le hangar pour prendre son agenda. Un type qui devait sauter prend le volant de sa voiture, sa fiancée me fait signe de la main, et ils s'en vont. Je suis terriblement déçue, mais j'essaye de voir le côté positif de la situation: la prochaine fois (dans deux semaines!), on connaîtra le chemin, et puis peut-être que je sauterai avec un jeune et beau moniteur!  Dans son bureau, le moniteur grogne: les gens commencent à s'affoler tout autour, en disant "on va peut-être pouvoir sauter!" Je le sentais. Le moniteur tenait à tout prix à sauter le matin même, il est furieux d'avoir été déçu et d'être confronté à une situation qui pourrait à nouveau tourner de la même façon, il ne veut plus de faux espoirs. On attend un peu... "Tous sous le hangar!" Youpi! Je le savais.
Pas d'instructions, on les a déjà eues le matin même. Harnachement rapide. Excitation et jubilation me reprennent. J'ai failli oublié de m'attacher les cheveux, mais j'ai eu une pensée de pitié pour Yves qui sera dans mon dos, sur moi pendant la chute.
Je me dirige vers l'avion, les pilotes attendent. L'un deux chantonne mon prénom. Moi aussi, je jubile. Je serai la seule fille dans l'avion, les clins d'oeil se multiplient... mes joues se rosissent. Ils entrent dans l'avion. Vite, me hisser au plus vite avant que quelqu'un ne change d'avis. Entre les jambes de Yves. Le "vidéoman" commence à me filmer. Très sympa, jeune, apparemment ravi de capturer mon sourire bananisant. Tous les autres prennent place dans l'avion. Décollage imminent. Un vidéoman sur ma jambe droite me fait frôler la crampe.  L'avion décolle. Ouf. Partis. Yves me fait comprendre que rien n'est encore sûr, il faut voir le ciel de là-haut pour décider. Je sais que je vais sauter. Je suis très zen, sûre de moi, fin prête.
On passe au-dessus des nuages: c'est magnifique. D'habitude, c'est ce que je vois de mon hublot! Prise de conscience subite: c'est de là-haut que je vais sauter! Un magnifique trou dans les nuages semble percé pour que nous nous y faufilions. Il y a trois binômes dans l'avion, je saute en dernière.
Le premier binôme s'assoit au bord du vide, tombe et se fait aspirer d'un coup! Horreur! Là, le stress monte, j'ai un peu peur, je suis très impressionnée! Je réalise brusquement ce qui m'attend... Ca va très vite, le deuxième binôme saute, je me dirige vers la porte, pas le temps de réfléchir, mon moniteur me dit de m'asseoir au bord, je me détends, et paf, on saute!
Je tombe!
Je huuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuurle! Un cri qui sort des poumons, jamais je n'ai crié comme ça! Les champs tout en bas, très loin, et je tombe la tête la première! Une sensation indescriptible, puissante et totalement inédite... C'est formidable, à la fois la pire des terreurs et la plus puissante des jouissances. Effrayant à l'extrême. Un énorme souffle d'adrénaline qui prend au corps et qui vide complètement la tête. Ensuite, le moniteur ouvre le petit parachute qui ne nous fait tomber "qu'à" 200 km/h. Là, c'est plus tranquille, mais encore intense. C'est toujours de la chute libre. Je ne ressens rien d'autre que le vide autour de moi qui s'est infiltré en moi, je ne pense plus à rien. Le vidéoman me prend les mains. Mes mains flottent de façon bizarre, je peux à peine les bouger, j'ai du mal à plier mes doigts. Le vidéoman me les lâche, et il se met à tomber, il n'est plus qu'un petit point sous moi: merde! Que lui arrive-t-il? Je réfléchis un instant: ah! Yves a ouvert le parachute, c'est nous qui avons ralenti et qui sommes remontés.
S'ensuit une belle balade en parachute. Je prends les commandes, j'exécute plusieurs vrilles, à couper le souffle. Vu d'en bas, il paraît que c'était très impressionnant. Fantastique. Yves est un petit gabarit, et moi un poids plume, le vent nous a maintenus en l'air très longtemps. Atterrissage en douceur. Pas de jambes en coton, juste les oreilles bouchées et le visage pâle (normal, je ne suis pas Sioux). J'ai l'impression d'avoir fait ça toute ma vie, c'était magique! J'adorerais le refaire. Ca a duré trop peu de temps à mon goût (une minute de chute libre pour un saut à 4000 mètres, et 8 minutes de parachute)... je souris tout le long du saut, sur le DVD. La chute était formidable, indescriptible. Une folie de terreur jouissive. Quelles sensations, quelles émotions, quels souvenirs! J'en reveux. Ce vide qui m'a envahie, et ce cri animal qui expulse l'atroce jouissance... Fabuleux.
Après le saut, la béatitude, la flottaison. Le papillon voletait encore là-haut. J'ai adoré.

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Commentaires
B
un papillon qui chute à plus de 200 kms/h<br /> soit c'est un papillon avec des super pouvoirs<br /> soit Tchernobyl est passé par là
L
> Yojik: la Féline est vorace, et contrairement aux idées reçues, on ne saute pas de repas lorsqu'on saute! La pâleur, c'était pour le côté félin aristo.<br /> <br /> > CarrieB: Le parapente m'a l'air trop pépère... Rien de meilleur qu'un beau plongeon.
C
C'est pour ça que moi ce sera parapente pour mes 30 ans tout (trop) bientôt, pour la 2ème fois, parce que j'aime avoir peur sur la durée ;-)<br /> Mais le parachute aussi faudra que je tente, t'as vu quand je t'avais dit que ça te plairait?
Y
'tain ça fait envie.<br /> Mais tu dis rien sur ton quatre heure.<br /> T'as pu le garder ou alors il fallait comprendre en lisant "j'étais toute pale" que non ?<br /> <br /> (Remarque si non, t'as bien fait de pas le dire, la Féline doit rester glam' :-)
L
> Slobodan: Qui te dit que le parachute maître Yoda n'était pas ?
Un rêve de papillon
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