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Un rêve de papillon
12 août 2006

Le bonhomme Carambar

Voici un nouvel exercice de style en binôme avec Slobodan. Les contraintes sont : faire apparaître un ténor, un parapluie et un bermuda lors d'une scène où un bonhomme Carambar est suspendu au plafond.

Bien sûr bien sûr. Voilà le résultat ! Vous pouvez lire la version serbe ici ...

Il était une fois un bonhomme Carambar suspendu au plafond d'un musée.
Jour et nuit, le bonhomme Carambar chantait d'une voix mielleuse et douce, tendre comme du caramel, pour divertir les enfants. Parfois, le caramel se faisait plus mou et l'on entendait des trémolos, d'autres fois, la voix durcissait pour inciter les nez aux Fites à s'intéresser à lui et à se lever, comme pour la star du rock qu'il jalousait, la petite Danette bien potelée.
Les gamins contemplaient le Carambar, c'était une oeuvre d'art à leurs yeux, la seule du musée, et ils remerciaient Gargamel, le Dieu du caramel, pour ce bonhomme seul représentant de son espèce, pour ce messie mou collé au plafond par un gamin illustre mais hélas! demeuré inconnu au bataillon du caramel.
Plus le temps passait, et plus le Caramel durcissait, sa voix commençait à s'érailler, mais les gamins faisaient semblant de ne pas le remarquer. Cependant, le bonhomme Carambar s'apercevait que les regards à son égard se faisaient plus rares, et il soupçonnait quelque oeuvre d'art moderne, une gomme à mâcher, un Chouine-Gomme, pour les enfants geignards, de lui avoir volé la vedette. Le Bonhomme Carambar devenait de plus en plus méfiant et jaloux, et il accumulait du fiel, qui se répandait sur les rares gamins en adoration, au goutte à goutte.
Le gardien du Musée appréciait beaucoup cette oeuvre d'art moderne et ludique, et pour cause: c'était lui-même qui avait envoyé le Carambar en l'air, le jour où il avait découvert Vermeer, vers l'âge de huit ans. Il avait voulu créer, lui aussi, un chef d'oeuvre, et avait insufflé la vie à son bout de confiserie. Il lui avait garanti une durée de vie quasi-éternelle en la soudant au plafond avec de la super-glue, espérant qu'elle se momifie avec le temps, tout en libérant son chant. Le  caramel était encore enveloppé de sa robe de papier, et présentait un visage sculpté par ses jeunes dents de lait. Pour protéger son oeuvre, dont il était extrêmement fier, il était devenu le gardien de ce musée. Il aimait voir les enfants envahir ce lieu culturel, pour adorer le fruit du mâchouillement de ses dents. Ce bonhomme Carambar représentait pour lui une ode à l'enfance, et son chant sucré toutes les douceurs des jeux parfumés quand venait l'heure du goûter. Le Chant des Sirènes n'aurait pas attiré plus d'âmes dévouées et de salive enchantée.
Malheureusement, le fiel du vieux Carambar délaissé le contrariait. Les enfants se plaignaient de plus en plus souvent de ce chef-d'oeuvre qui laissait couler son jus, perdant ainsi sa souplesse et sa beauté, et s'asséchant comme une vieille carne. Ses fans se raréfiaient, et le gardien du musée dut employer les grands moyens, avec de petits moyens, en fait. Il fit installer un parapluie sous l'oeuvre décrépie, et fit apposer un panneau: "Protégé pour cause de rénovation". En réalité, de rénovation point n'était question. Il avait juste trouvé une astuce pour que les enfants cessent de se plaindre de son oeuvre, et il avait peint des yeux curieux sur la face du parapluie que le Carambar pouvait voir.
En effet, comme le bonhomme Carambar était en dépression, il fallait le ménager et lui faire croire qu'il était toujours très admiré. Mais si le bonhomme Carambar était vaniteux, il était aussi assez malin: dès le deuxième jour, il remarqua qu'on l'avait dupé. Les yeux n'avaient pas bougé de la nuit, et le musée ne faisait jamais de visites nocturnes. Alors le Carambar bouda de plus belle, car il soupçonnait un complot des gommes à mâcher.
Le gardien du musée était complètement désemparé. Il enleva le parapluie, ayant constaté que le Carambar prenait un malin plaisir à couler à côté. Il enfila un bermuda rouge à pois jaunes, pour passer la serpillère sur le sol tout caramélisé, et quelque peu léché par des fans avertis et non surveillés. Les gamins, en le voyant laver le sol en bermuda, se mirent à rire, à rire très fort, et le gardien en fut tout vexé.
En revanche, le bonhomme Carambar ne rit pas, mais crut que le gardien voulait tirer profit de son statut méconnu d'artiste de génie, et toucher enfin le plafond de la gloire. Or, le Carambar n'avait aucunement l'intention de partager son plafond, même avec son créateur, et il multiplia les bavures empoisonnées. Le gardien voyait bien que la moisissure ne cessait de gagner du terrain, que la couleur tendre du Carambar se ternissait, que son chant grinçait.
Désabusé, et constatant le dégoût des enfants, le gardien tenta un dernier remède. Il fit appel à un ténor italien, dans l'espoir que son chant puisse redonner envie au bonhomme Carambar de donner envie de sucre aux enfants. Le gros ténor accepta, pour l'amour des confiseries qui avaient adouci sa voix d'enfant, et lui avaient procuré une corpulence digne de son futur métier. Tout jeune déjà, il avait un coffre à Carambars, et devenu ténor, il avait du coffre et une voix caramélisée. Les Carambars avaient donc eu une influence considérable sur sa vie, il voulait rendre hommage à leur inspiration de génie.
Le ténor se tint tout droit sous le Carambar flétri. Il commença à chanter avec un profond vibrato qui fit trembler le Carambar, brusquement réveillé de sa sieste bougonne.
"Qui va là?" demanda le Carambar soufflé. "On veut me voler la vedette!"
Et le Carambar partit dans un chant tout éraillé: "Ô solllllllllllllleeeeeeee miiiiiiooooooooooo".
"Non, taisez-vous! Halte au massacre!" hurla le ténor tout déconfit. "Apportez-moi donc votre bermuda et votre parapluie", demanda-t-il au gardien. Celui-ci s'exécuta, et le ténor jeta son habit d'opéra. Il enfila le bermuda et fit rouler le parapluie sous ses doigts, en chantonnant d'une voix fausse: "I'm siiiiinging in the raiiiin, just siiingiiing..."
"Stoooooooooop!", cria le bonhomme Carambar, hoquetant de rire. "D'accord, j'arrête de pleuvoir du fiel, pour que cet abruti de ténor cesse de massacrer mon ciel. Je n'ai jamais vu quelque chose de si ridicule que cet homme à la belle voix chantant comme une noix, accoutré comme un gardien de musée défroqué."
"Merci pour moi!" dit le gardien de musée.
"Oh toi, on ne t'a pas causé", lança le bonhomme Carambar au gardien médusé. "Ici, c'est moi la vedette, je vais vous montrer."
Et le bonhomme Carambar se redressa, pour montrer au ténor que de sa belle voix, il pouvait lui faire lâcher sa proie. Euh, pardon, son parapluie. Et faire tomber son bermuda. Il commença à chanter de sa voix mielleuse et entraînante... le ténor se remémora ses années d'enfance, et tous les gamins accoururent autour du ténor, en chantant en coeur après le Carambar: "Je suis mouuuuuu de vouuuuuuus".
Le ténor fut si ému qu'il se prit les pieds dans le bermuda et mangea son parapluie.
"Quand l'appétit va, tout va, quand l'appétit va, tout va....."

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Commentaires
Y
Et même je suis reviendu.<br /> (ça c'est du commentaire, prenez exemple les autres :-)
L
Yoyo!!! <br /> Oh, c'est pas grave, du moment que tu n'as pas dessalé du côté de la Serbie...<br /> Ca fait plaisir de voir que t'es pas mouru! :-)
Y
Tsé quoi ?<br /> Je suis pas hyper doué en serbe.
L
Alors n'oublie pas tes vocalises!
B
I Carambar!
Un rêve de papillon
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